Aujourd’hui on entend certains prétendre que la divergence d’opinions entre les savants sur les branches de la religion est une mauvaise chose et qu’il faut faire disparaître cela en amenant tout le monde vers une même opinion ou une même école de pensée. Cette conception des choses est erronée et n’est en aucun cas la position des grands savants vertueux de notre communauté. C’est pour cela qu’on citera la position de grandes références musulmanes comme l’Imam An Nawawi, Shatibi, Al-Suyouti et d’autres sur la divergence entre les savants musulmans.
Pour commencer, citons quelques propos rapportés du livre du grand savant l’Imam Jalalu-din Al-Suyuti (jazil al mawahib fi ikhtilafi al-madhahib).
Ibn Sa’d rapporte que Omar Ibn Abdela’azziz a dit :”Je ne tronquerais pas les plus beaux troupeaux de chamelles contre les divergences des compagnons du Prophète“, Mohammed Bayahqi dans son Madkhal rapporte une autre version en ces termes “Je ne me réjouirais pas si les compagnons de Mohamed n’avaient pas divergé. Car, s’il n’y pas eu de divergences entre eux il n’y aurait plus eu de dispenses”.
L’Imam Al-Khatib Al Baghdadi rapporte ceci dans son livre sur les biographies des transmetteurs d’après Malik: “Le calife Abbasside Al-Rachid a dit à Malik ibn Anas “Oh Abou Abdallah ! Veux-tu que nous recopions tes livres et que nous les rependions dans toutes les contrées de l’Islam pour obliger la communauté musulmane à le suivre ?” Malik répondit “Oh prince des croyant ! Les divergences des savants sont une miséricorde de la part d’Allahpour cette communauté. Chacun suit ce qu’il estime être fondé. Chacun désire Allah.”
L’Imam jalalu- din Al-Suyuti dit dans son livre “Sache que les divergences entre les écoles doctrinales ou rites juridiques (madhahib) constituent dans la religion un immense bienfait et une grande vertu. Cette divergence renferme un secret subtil que perçoivent les savants et qui échappent aux ignorants”.
La position de l’Imam al-suyuti est celle des autres grands imams au sujet de la divergence entre les savants de l’islam et elle est la position de ahl sunna wa-l- jama’a. Ces derniers sont les défenseurs de l’islam authentique, celui qui nous a été transmis par les compagnons du Prophète.Nous devons en tant que musulmans nous attacher à leurs opinions (des grands savants) puisqu’ils sont les dignes héritiers du Prophète et ne pas suivre les opinions isolées de certains sur cette question fondamentale pour le bien de la communauté musulmane .
Les compagnons du Prophète eux aussi n’exprimaient pas des opinions similaires, mais leurs débats ont été tenus avec beaucoup de sagesse et de respect.
Les Imâms des Ahl Us Sunnah affirment que la divergence d’opinions juridiques au sein de la Ummah est une miséricorde d’Allah (qu’Il soit bénit et exalté).
Cependant, certains ce sont permis de contredire cela comme Ibn Hazm Az Zâhirî et d’autres à notre époque, mais leurs paroles ne fait pas le poids face aux innombrables Imâms des Ahl Us Sunnah.
La parole de Ibn Hazm à propos du fait que la divergence est une miséricorde est la suivante : « C’est une des paroles les plus incorrectes qui soit, car si la divergence était une miséricorde, alors l’accord serait une punition, ce qu’aucun musulman ne dirait, parce qu’il peut seulement y avoir accord ou désaccord et il peut seulement y avoir miséricorde ou punition. » [Al Ihkâm fî Usûl Il Ahkâm].
Ces propos furent réfutés par l’Imâm des Shâfi’ites de son temps, Ash Shaykh Ul Islâm Muhyi Ddîn An Nawawî (qu’Allâh lui fasse miséricorde), qui a dit dans son commentaire du SahîhMuslim intitulé Al Minhaj : « Si quelque chose est une miséricorde, cela ne signifie pas que l’inverse de cette chose est l’inverse d’une miséricorde. Personne ne fait ce genre de lien, et personne ne dit même ce genre de choses sauf un ignorant ou celui qui affecte l’ignorance».
Allâha dit : « Et parmi Sa Miséricorde, il a créé la nuit pour vous afin que vous vous y reposiez. », et Il a qualifié la nuit de miséricorde : pourtant, cela n’implique pas forcément que le jour soit une punition. »
Et mentionnons que l’Imâm Badr Ud Dîn Az Zarkashî (qu’Allâh lui fasse miséricorde) rapporta que l’Imâm de Médine de son temps, la lumière des Salaf Us Sâlih, Sayyidunâ Al Qâsim Ibn Muhammad Ibn Abî Bakr As Siddîq (qu’Allâh lui fasse miséricorde ainsi qu’à sa pieuse ascendance) a dit : « Les divergences parmi les Compagnons de Muhammad sont une miséricorde pour les serviteurs d’Allâh. » [Tadhkirah fil Ahâdîth Il Mushtaharah].
Et mentionnons également la fatwâ de l’Imâm Abû Is-hâq Ash Shâtibî (qu’Allâh lui fasse miséricorde) qui a dit sur ce sujet :
« Une grande partie des Salaf(les grands imams des premières générations) a considéré que les divergences dans les branches [de la religion] étaient un des signes de la miséricorde d’Allâh. Ce qui clarifie le fait que la divergence susmentionnée soit une miséricorde, et c’est ce qui est rapporté des propos de Al Qâsim Ibn Muhammad : « Allâh nous a fait bénéficier des divergences parmi les Compagnons du Messager d’Allâh dans leur pratique. » Et personne ne s’est attaché à la pratique de l’un d’entre eux sans qu’il (Al Qâsim) ne l’ait considéré sur la bonne voie.
Dumrâ Ibnou Rajâ° a rapporté : « ‘Umar Ibn ‘Abdi Il ‘Azîz et Al Qâsim Ibn Muhammad se sont rencontrés et commencèrent l’analyse de ahâdîth. ‘Umar a ensuite commencé à parler des choses qui différaient de ce que Al Qâsim avait mentionné, et Al Qâsim allait lui donner du fil à retordre concernant cela, et ceci jusqu’à ce que la situation devienne plus claire. [Sachant cela], ‘Umar lui dit alors : « Ne fais pas ça ! Je déteste ôter les faveurs [d’Allâh] provenant des divergences. ». »
Ibn Wahb a également rapporté que Al Qâsim a dit : « J’ai été heureux de la parole de ‘Umar Ibn ‘Abd Il ‘Azîz : « Je détesterais que les Compagnons n’eurent pas divergés entre eux, car s’ils n’avaient pas divergé, il n’y aurait alors aucune liberté [pour nous]. Vraiment, les Compagnons sont des Imâms par lesquels les gens sont guidés. Si quelqu’un suit la parole de l’un d’entre eux, il est dans la Sunnah. ». »
La signification de tout ceci est qu’ils (les Compagnons) ont ouvert la porte de l’ijtihâd (effort d’interprétation) ainsi que celle de la permission de la divergence dans l’ijtihâd pour les gens. S’ils ne l’avaient pas fait, les mujtahidîn auraient été dans une impasse, car les confrontations d’ijtihâd et d’avis personnels ne concordent généralement pas : les gens qui pratiquent l’ijtihâd seraient, malgré l’obligation de suivre ce dont ils sont convaincus, obligés de suivre ce avec quoi ils ne seraient pas d’accord, et ceci constituerait une obligation insoutenable et l’une des contraintes les plus éprouvantes.
Les divergences pour qu’elles aient du crédit doivent présenter des arguments solides, être dotées d’objectivité, être débattues loin de toute polémique.
Il existe des sujets de controverses illicites, car étant basées sur aucun fondement. L’esprit critique négatif n’est pas le bienvenu dans ces cercles, car désapprouver un avis pour le simple plaisir, sans argumentation relève de la bassesse.
Allâh a donc donné une liberté d’action à la communauté à travers l’existence de la divergence en son sein dans le domaine des branches de la Sharî’ah. C’est la porte qu’Il a ouverte pour la communauté afin qu’elle soit comblée par Sa miséricorde. Comment pourraient-ils ne pas être ceux concernés par « Ceux à qui ton Seigneur a fait miséricorde » dans le verset : « Et ils ne cessent de diverger, exceptés ceux à qui ton Seigneur a fait miséricorde » [Sûrah 11 – Âyât 118 & 119].
Donc, leurs divergences dans les branches de la loi sont sur le même plan que leur accord [suite au fait que ces deux cas constituent une miséricorde pour la communauté musulmane]. Et toute la louange est à Allâh. »
Telle est donc la position des Ahl Us Sunnah wal Jamâ’ah à l’égard des divergences d’opinions juridiques.
Ash Shaykh Ahmad Ibn Taymiyyah, a dit : « Le consensus des Imâms est une preuve indubitable et leur divergence est une vaste miséricorde. » [Mukhtasar Fatâwî Al Misriyyah].
Que les détracteurs de la Sunnah et de l’Islâm légué par nos pieux prédécesseurs se rendent donc à l’évidence, la divergence est une miséricorde pour la communauté musulmane, et s’opposer à cela est une innovation blâmable (bid’ah) et une rébellion à l’encontre de nos savants.
En résumé :
- .Les divergences légitimes se fondent sur une approche intellectuelle, une connaissance profonde des deux références, à savoir le coran et la tradition du prophète, un esprit critique constructeur.
- Les divergences illicites : sont celles qui ne font part d’aucune logique, présentant une carence intellectuelle animées par de mauvaises intentions. Le mérite des ulémas : dans le cas où ils émettent une réponse juste, ils bénéficieront de deux récompenses, mais s’ils se trompent dans leurs déductions, ils n’en auront qu’une seule pour leurs efforts intellectuels fournis.
- Engager une polémique ne doit pas envenimer les relations entre les interlocuteurs.
- Dans le plus grand respect des deux sources juridiques ; le coran et la tradition du prophète.
- Exprimer son opinion, ou argumenter se fait dans l’amour de l’autre.
- Les ulémas symbolisent les étoiles qui brillent dans l’univers
Qu’Allâh nous guide sur le droit chemin, le chemin tracé par Son Noble Messager, Ses Compagnons, et ceux qui les ont suivis, Allâhumma Âmîn.
Wa Allâhou A’lam !
Et Dieu est Plus Savant !
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